Abeilles sauvages au Jardin du marais
La terre n’est pas bien profonde dans les marais du Cotentin ! A peine quelques dizaines de centimètres composés d’une matière végétale lourde et collante qui recouvre la pierre calcaire d’anciens lits maritimes fossilisés.
Y faire un jardin est un défi à relever, d’autant plus que les conditions hivernales pluvieuse et fraiches renforcent la problématique d’acclimatation des plantes.
Les alignements de vieux frênes taillés en têtard offrent aux oiseaux et aux insectes leurs troncs creux comme autant de refuges au vent qui balaye le plat marais. Au jardin du marais, les champs sont limités par des talus de terre et cailloux plantés de frênes centenaires qui procuraient auparavant du bois de chauffe tout en drainant le sol grâce à leurs longues racines horizontales. Comme des sentinelles, ils sont restés en place au cœur du jardin, bordés de fleurs et d’arbustes.
Ce ne fut pas une surprise que de voir s’installer une colonie d’abeilles noires dans un des troncs creux du jardin ! Des fleurs, du lierre, des prairies naturelles fauchées tard dans la saison, que demander de plus pour des abeilles à la recherche d’un logis ?
Dès la première année de plantation, des frelons Européens dits ‘crabo’ s’étaient installés au sein de ce refuge naturel, et par bonheur ils furent remplacés par un essaim d’abeilles noires de passage.
Les envols sont discrets, presque invisibles si l’on n’y prête pas attention. Nous n’avons jamais eu à subir de piqure ou d’attaque d’une abeille, tout au plus une abeille qui se manifeste si nous utilisons un moteur thermique à proximité.
C’est en observant avec discernement le fait supérieur de l’arbre que l’on remarque combien la colonie est active. Quelques abeilles en gardent l’entrée alors que d’autres s’engouffrent directement à l’intérieur. Les journées chaudes et ensoleillées entrainent des envols fréquents toutes les deux secondes et le parcours d’approche change suivant le jour ou le vent.
Durant le printemps et l’été, alors que la journée est calme et chaude, les abeilles sortent du tronc en masse et s’étendent sur toute ou partie du jardin, volant dans tous les sens. Très impressionnant, ce vol multiple et désordonné émet un vrombissement. Les abeilles se posent un peu partout au hasard, parfois jusqu’au sol. On mesure alors la quantité impressionnante des logeuses qui s’envolent par milliers d’individues.
L’an passé, un essaim s’est formé sous l’arche d’un rosier grimpant du jardin. Ma tête frôlait cette grappe noire silencieuse alors que je passais dessous. Un rouge gorge curieux semblait désappointé par cet envahisseur si prêt de son nid ! Le lendemain, tout avait disparu et le calme était revenu. Pourtant, quelques irréductibles insectes avaient fait le choix de rester dans ce havre de paix ou il faisait si bon butiner les fleurs ! Les abeilles étaient là, toujours discrètes à polliniser les fleurs des pommiers, participant sans le savoir à la fructification des arbres et à notre récolte future.
Parfois, un nouvel intru se présente, grignotant une pomme à l’automne ou traversant le jardin dans un vrombissement puissant. C’est dit-on, la terreur des apiculteurs ‘ le frelon asiatique’ qui aurait colonisé toute l’Europe, squatteur d’une cruche de terre cuite importée de chine ! A l’heure des grands échanges internationaux nous avons tous nos virus et nos prédateurs.
Nos petits jardins ‘oasis de nature’ sont de bien faibles abris devant le rouleau compresseur de la mondialisation. Souhaitons que ces insectes dit nuisibles s’il en existe un seul sur notre planète, ne découvre pas ce petit secret de nature logé au creux d’un tronc et que je continue encore pendant de longues années à observer.
Les fleurs d’Echiums et de Sedum à l’automne sont encore couvertes d’abeilles qui rivalisent avec les papillons. Gorgées de nectar, je m’enhardi à les caresser parfois ! Une pate levée, elles me parlent un peu comme si le message passait … on te connait toi ! Tu nous aimes !
Date de dernière mise à jour : 29/03/2021